L’usine ECOCEA de Chagny (traitement de déchets ménagers) est l'un des 44 sites en France injectant du biométhane dans les réseaux gaziers à fin 2017. Ici, les deux digesteurs verticaux. (©GRTgaz/Jacques Olivier)
Plusieurs publications ont récemment mis en lumière le développement de la production de gaz « renouvelable » et de l’injection de biométhane sur les réseaux gaziers en France. État des lieux.
La production actuelle de biométhane en France
Le biogaz produit par méthanisation de déchets organiques fermentescibles (effluents d'élevages, déchets municipaux, etc.) est actuellement essentiellement utilisé à des fins de production de chaleur ou d’électricité. Ce biogaz peut toutefois aussi être injecté sur les réseaux gaziers après avoir été purifié et odorisé(1) : il est alors qualifié de « biométhane » (ou de « bioGNV » lorsqu’il sert à alimenter des véhicules comme carburant).
Sur les 592 sites produisant du biogaz en France à fin 2017, 44 l’ont valorisé sous forme de biométhane injecté sur les réseaux de gaz naturel. Autorisée depuis fin 2011, cette injection de biométhane s’est élevée à 406 GWh en 2017, contre 215 GWh en 2016 selon la 3e édition du Panorama du gaz renouvelable(2) publié le 5 avril par les gestionnaires des réseaux gaziers en France (GRDF, GRTgaz, Teréga(3), SPEGNN) et le syndicat des énergies renouvelables (SER).
Les sites d’injection de biométhane en France avaient une capacité de production cumulée de 682 GWh par an à fin 2017, soit une hausse de 66% par rapport à fin 2016 (410 GWh). Cela correspond à l’équivalent de la consommation gazière annuelle « d’environ 34 000 foyers ou 1 600 camions/bus » selon les gestionnaires de réseaux. Le biométhane ne compte toutefois encore que pour près de 0,1% de la consommation française de gaz naturel.
La production française de biométhane a augmenté de près de 89% entre 2016 et 2017. (©Connaissance des Énergies, d’après Observatoire du biométhane)
S’il existe de nombreux types de sites d’injection de biométhane (agricoles, industriels, stations d’épuration, etc.), la production française de gaz renouvelable est actuellement « très liée au monde agricole » et « concentrée dans le nord-est de la France », souligne l’Observatoire du biométhane publié le 9 avril par le think tank France Biométhane et le cabinet Sia Partners(4) : 24 des 44 unités produisant du biométhane en France sont situées dans les régions du Nord-Est, Haut-de-France, Grand-Est et Ile-de-France et deux tiers des projets concernent des intrants agricoles et agroalimentaires.
Sur les 44 sites injectant du biométhane en France à fin 2017, 29 proviennent du milieu agricole. (©Connaissance des Énergies, d’après Panorama du gaz renouvelable)
Les objectifs de développement
Bénéficiant d’un tarif d’achat réglementé(5) garanti durant 15 ans, la filière du biométhane a profité de deux nouvelles « mesures favorables » en 2017, rappelle le Panorama du gaz renouvelable : une réfaction tarifaire sur les coûts de raccordement au réseau de distribution et l’ouverture des stockages souterrains au biométhane(6).
Pour rappel, la loi de transition énergétique pour la croissance verte a fixé pour objectif de porter à 10% la part de gaz renouvelable dans la consommation française de gaz naturel à l’horizon 2030. La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui doit être révisée d’ici fin 2018, fixe actuellement un objectif spécifique d’injection de biométhane de 8 TWh en 2023.
Or, près de 361 nouveaux projets d’injection de biométhane sont recensés en France par le Panorama du gaz renouvelable à fin 2017. Ces projets « en file d’attente » (étape avant raccordement, atteinte lors de l’étude 2 de faisabilité ou détaillée, la totalité d'un projet durant en moyenne 5 à 7 ans) ont une capacité maximale de production cumulée de 8 TWh par an, soit l’objectif de la PPE pour 2023.
Compte tenu de cette dynamique, les opérateurs de réseaux gaziers et le SER proposent « une accélération du développement des gaz renouvelables avec un objectif réaliste de 60 TWh pour 2028, dont plus de 50 TWh de biométhane issu de méthanisation et de 5 à 10 TWh de gaz renouvelables issus d’autres procédés » (pyrogazéification, power to gas associé à la méthanation).
Et ailleurs en Europe ?
L’Observatoire du biométhane fait état d’une « Europe du biométhane à deux vitesses », avec « d’un côté, les pays dont la filière est jeune et dynamique comme la France, l’Angleterre et l’Italie qui fait une entrée remarquée sur le marché » et, « de l’autre, les pays ayant une production mature comme la Suède et l’Allemagne, qui reste le leader européen avec 203 unités de biométhane ».
Selon le Panorama du gaz renouvelable, l’Allemagne disposerait d’une capacité maximale installée d’injection de biométhane de 22 TWh par an(7), soit plus de 32 fois celle de la France. Le développement de la filière biométhane est également avancé au Royaume-Uni où la production est subventionnée depuis 2011.
Plus de 500 installations de production de biométhane étaient en service à fin 2017. (©Connaissance des Énergies, d’après Observatoire du biométhane)