Selon le scénario REmap de l’Irena, l’éolien pourrait compter pour 36% de la production électrique mondiale en 2050. (©Vestas)
L’agence internationale pour les énergies renouvelables (Irena) estime qu’il faudrait développer les énergies renouvelables « au moins six fois plus vite » pour atteindre les objectifs de la COP21.
Un budget carbone épuisé dès 2037 dans le scénario de référence
En 2017, les émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie ont augmenté de 1,4%, atteignant un niveau record de 32,5 Gt selon les dernières données de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Et dans l’état des politiques énergétiques actuelles ou annoncées, le monde pourrait « épuiser son budget carbone lié à l’énergie en moins de 20 ans » selon un rapport publié le 17 avril par l’Irena(1).
Il faudrait limiter à 790 Gt de CO2 les émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie entre 2015 et 2100 pour respecter ce budget carbone et espérer atteindre l’objectif de la COP21 (avec une probabilité de 66%), à savoir contenir à moins de 2°C le réchauffement climatique mondial d’ici la fin du siècle(2), rappelle l’Irena.
Comme de nombreuses organisations internationales (et Shell récemment), l’Irena a actualisé son scénario jugé compatible avec la cible des 2°C (baptisé « REmap »). Le développement massif des énergies renouvelables et d’importants gains en efficacité énergétique constituent « la pierre angulaire » de ce scénario, contribuant pour « plus de 90% aux réductions nécessaires des émissions de CO2 liées à l’énergie » d'ici à 2050, selon Adnan Z. Amin, directeur général de l’Irena.
Dans son scénario de référence, l’Irena envisage une hausse des émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie, avec un « budget carbone » dépassé dès 2037. (©Connaissance des Énergies, d’après Irena)
85% d’électricité renouvelable en 2050 dans le scénario REmap
Pour atteindre la cible des 2°C, les énergies renouvelables devraient satisfaire les deux tiers de la consommation d’énergie primaire en 2050 dans le scénario REmap de l’Irena, contre seulement 15% en 2015 (et 32% en 2070 dans le scénario de Shell). Cela correspondrait à « une accélération d’un facteur au moins 6 (du rythme de développement) des énergies renouvelables » selon l’agence, et ce dans les différents secteurs (production électrique, chaleur, transports, etc.). L’intensité énergétique mondiale, c’est-à-dire la consommation d’énergie par point de PIB, devrait quant à elle chuter des deux tiers d’ici à 2050 (elle a baissé de 1,7% en 2017).
L’Irena envisage une forte électrification dans son scénario REmap, avec un doublement de la part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie entre 2015 (20%) et 2050 (40%). La production électrique mondiale pourrait reposer à 85% sur les énergies renouvelables au milieu du siècle selon les estimations de l’Irena, contre près de 25% en 2015.
C’est l’éolien et le solaire photovoltaïque qui fourniraient la principale contribution au développement des énergies renouvelables dans le secteur électrique selon l’Irena. Pour pallier l’intermittence de leur production (62% de production « variable » en 2050), l’agence estime qu’il faudrait près de 9 000 milliards de dollars d'investissements supplémentaires d'ici à 2050 (par rapport au scénario de référence) dans le stockage, les réseaux et des solutions de flexibilité, sans préciser la nature des solutions de stockage.
Au total, la transition énergétique accélérée du scénario REmap est chiffrée à 120 000 milliards de dollars(3) entre 2015 et 2050 (près de 44% de ces investissements étant dédiés à l’amélioration de l’efficacité énergétique), contre 93 000 milliards de dollars pour le scénario de référence. Les surcoûts du scénario REmap seraient toutefois « largement » compensés par les externalités positives associées selon l'Irena (réduction de la pollution de l’air, meilleure santé, moindres dégâts environnementaux)(4). D'après les estimations de l'agence, ce scénario pourrait par ailleurs permettre un gain net de 11,6 millions d’emplois dans le secteur énergétique au niveau mondial à l'horizon 2050(5).
Si les scénarios jugés compatibles avec l’objectif des 2°C prévoient des transitions énergétiques plus ou moins radicales et différentes d’une organisation à une autre, notons qu’ils partent toujours d’un constat commun, comme ici l’Irena : « une action immédiate est cruciale ».
Dans le scénario REmap, la part des énergies décarbonnées (nucléaire inclus) dans la production électrique mondiale passerait de 34% en 2015 à 89% en 2050. (©Connaissance des Énergies, d’après AIE)